Dans son livre intitulé « LA GRENOUILLE QUI NE SAVAIT PAS QU’ELLE ETAIT CUITE …ET AUTRES LECONS DE VIE » écrit en 2005 , OLIVIER CLERC nous invite à réfléchir et à voyager, à partir de fables universelles, animalières et végétales.
Laissez-moi partager avec vous la première, celle qui est reprise dans le titre de son recueil.
Le titre de l’ouvrage « LA GRENOUILLE QUI NE SAVAIT PAS QU’ELLE ETAIT CUITE » est à lui seul est une métaphore. Nous invitant à la réflexion.
Imaginons une marmite remplie d’eau froide, dans laquelle nage tranquillement une grenouille. Le feu est allumé sous la marmite, l’eau chauffe doucement. La température est agréable, la grenouille continue de nager. En réalité, elle ne se rend pas compte du danger… et finit par cuire. Jetez la même grenouille dans une marmite d’eau à 50 degrés, un réflexe de rejet lui sauvera la vie.
A partir de cette première situation, c’est le manque de réaction de la grenouille qui lui est fatal. A l’instar des personnages des fables de la Fontaine, la grenouille…c’est chacun de nous ! Le piège, ici la marmite qui se réchauffe progressivement, interpelle sur nos capacités, qu’elles soient individuelles ou collectives, à réagir à un environnement dégradé. Et le danger, on le voit bien, s’émousse autant que nos facultés à apprécier une détérioration progressive.
Sur quoi nous interroge l’auteur dans cette fable ?
Et bien… sur nos propres repères. Nos propres instruments intérieurs. Qui le plus souvent fonctionnent à notre insu. Nos influences socioculturelles, familiales, religieuses. Bref ce sur quoi nous travaillons quand nous prenons conscience de ce qui nous a construit depuis tout petit, consciemment et … inconsciemment.
Alors quoi ? Dans le grand bain de la Vie, notre conscience pourrait-elle s’endormir par excès de sollicitations en tout genre ? Serait-il possible que notre mémoire soit émoussée par trop d’informations… inutiles ? Se pourrait-il que notre idéal soit asphyxié par le consumérisme ambiant ?
Et bien oui !..
La loi de la matière, livrée à elle-même est appelée « entropie ». Autrement dit, le processus de transformation de la matière dépend du soin que l’homme lui apporte. Il faut une intervention extérieure qui s’accompagne d’une grande dépense d’énergie pour remettre en place les choses, et ramener l’ordre. Ainsi, sous-jacente mais fondamentale, la question que nous sommes actuellement en droit de nous poser pourrait être : « A quoi ressemblera la planète que nos enfants et petits-enfants habiteront ? »
Un constat s’impose : ce dont on ne prend pas soin décline. Qu’il s’agisse de la santé de notre corps, de notre jardin, d’une relation, ou de l’organisation sociale d’un pays, …tout demande des efforts, des soins, de l’entretien ! Une maison abandonnée à elle-même passera vite de l’ordre au désordre. Symboliquement parlant, les maux dénoncés dans cette fable peuvent être l’obscurantisme moral et spirituel, le délitement social, mais aussi la dégradation de notre environnement, ou encore les dérives technologiques, voire l’abrutissement de masse…
Alors, comment pouvons-nous œuvrer pour que cesse le laisser-faire généralisé ? N’est-ce pas utopique ou vain de refuser un état de fait qui engourdit nos consciences, nos idéaux et nos mémoires ?
L’auteur nous invite à cultiver une forme de DOUTE. Alors pas le DOUTE qui critique à tout va, non. Celui qui ne se satisfait pas des apparences. Celui qui pousse à vérifier, à se remettre en question, à sonder ses propres certitudes.
Quelles modalités envisager pour éviter de succomber dans la marmite ? Pour dépasser un piège autant individuel que collectif ?
En 1er lieu, développer sa conscience.
Olivier CLERC considère que notre conscience est fondatrice de notre humanité. Et qu’elle est LE moteur de notre évolution.
En second lieu, il s’agit d’aiguiser sa mémoire. De façon à hiérarchiser ses souvenirs, à avoir des éléments de comparaison entre passé et présent. Et pratiquer l’oubli sélectif en vue de faire place à l’essentiel.
En 3ème lieu, se dépasser. A partir d’idéaux de vie. La sagesse des différentes cultures du monde et des époques est aujourd’hui accessible au plus grand nombre. Et bien des figures œuvrent à formuler les messages spirituels de traditions plurielles. Citons des « passeurs » comme Don Miguel RUIZ pour les Toltèques, Lama YESHE chez les Tibétains, Sabonfu SOME pour la sagesse africaine, ou Mikael AîVANHOV pour le message chrétien…
Mais, à ce stade de la réflexion, revenons peut-être sur la métaphore de la grenouille. Le fait de ne pas percevoir un changement progressif, et ce qui en découle, l’absence de réaction adaptée, pourrait passer inaperçu. En effet, les changements qui se produisent en nous et autour de nous, que ce soit à petite et à grande échelle, ne produisent pas d’effets visibles à court terme. Cela est vrai pour tout travail intérieur, pour la méditation, pour la prière. De la même façon dans le domaine social, l’évolution des droits civiques ou des conditions de travail s’est faite lentement, sur plusieurs décennies.
Or, si nous ne voyons pas les résultats de notre travail intérieur, nous pouvons nous décourager et renoncer. Alors qu’avec davantage de persévérance, nous verrions nos efforts récompensés.
Il en va de même sur le plan social. Si nous ne percevons pas les avantages dont nous jouissons, ou les droits dont nous bénéficions, nous pouvons cultiver l’ingratitude, le mécontentement, et nous montrer incapables d’apprécier les fruits d’une évolution. Certes lente, mais réelle.
L’élément le plus important de l’allégorie de la grenouille c’est l’inconscience du changement. Cette inconscience est préjudiciable. C’est donc de notre conscience que dépend tout le reste. A quoi bon un idéal si nous restons aveugles à nous-mêmes ?
Première nécessité : celle d’être conscients. Rester en éveil. Garder son esprit critique pour sortir du bouillon de la culture ambiante que véhiculent les médias, version moderne de la caverne de Platon.
Seconde nécessité : aiguiser sa mémoire. Faire des allers retours critiques entre passé et présent. En vue de contrebalancer cette culture de l’immédiateté dans laquelle nous sommes immergés.
Pour conclure sur cette réflexion, vous conviendrez peut être avec moi que la Vie (illustrée ou pas par les allégories d’Olivier CLERC) est loin d’être un long fleuve tranquille. Avec son lot d’épreuves, de difficultés, de conflits, la Vie nous donne du « fil à retordre ».
Qui ne s’est jamais heurté dans sa relation à des coups bas ? Qui ne s’est jamais vu refermer des portes sous des prétextes fallacieux ? Qui n’a jamais eu à subir des injustices ? Qui n’a pas eu à courber l’échine sous le poids de petits ou de grands problèmes ? Alors, les difficultés que nous traversons ne seraient-elles pas autant d’occasions d’apprendre ?
La déstabilisation que créée l’imprévu nous amène à utiliser des ressources jusqu’alors insoupçonnées. Et en fin de compte sortir différent(e)s des épreuves rencontrées. Prendre conscience que l’adversité fait partie de la vie et que l’échec n’est pas un drame revient à changer son regard. Nous qui vivons dans une société prenant la performance en modèle, et portant un regard négatif sur l’erreur, nous voilà secoués par la dissonance.
N’apprenons-nous pas de nos erreurs ? Ne nous transformons-nous pas sous les coups du sort ?
Savoir que les obstacles n’ont pas qu’un côté sombre, mais aussi un côté lumineux permet de les aborder autrement.