Les pièges de la relation

par | 3/12/2025

LES PIEGES DE LA RELATION

Les interactions humaines peuvent parfois nous faire vivre un véritable enfer.

Le plus souvent, c’est dans notre milieu familial (le premier système dans lequel est immergé un jeune enfant, avant d’autres milieux comme les systèmes scolaire, social ou professionnel) que nous entrons dans un mélodrame relationnel complexe et potentiellement blessant.

Plus tard, en prenant conscience des blessures vécues dans nos relations, nous cherchons à identifier et à mieux comprendre les leviers de ces difficultés relationnelles.

Certaines relations peuvent d’ailleurs nous faire souffrir tout au long de la vie.

Est-il sain d’échapper à des relations dites « toxiques » ? Et comment s’en défaire ? Est-ce possible ?

Pour tenter d’y répondre, un modèle social des interactions humaines permet d’y voir plus clair.

Il s’agit du triangle de KARPMAN.

Ce triangle dramatique est un outil d’analyse transactionnelle développé en 1968 par le psychologue américain Stephen KARPMAN. Il représente un modèle social d’interactions humaines dans lequel trois rôles s’affichent : victime, bourreau et sauveur.

La victime : celui qui se sent persécuté

Le sauveur : celui qui vient en aide à la victime

Le persécuteur : celui qui prend pour cible la victime

Il est difficile d’échapper à ces différents rôles, car très souvent nous les jouons à tour de rôle inconsciemment dans cette pièce de théâtre qu’est la vie, et nous en tirons profit.

Chacun des trois acteurs trouvera une réponse à ses propres attentes en jouant son rôle. Ces rôles peuvent être mis en relation avec les « quatre mythes »

• J’ai le pouvoir de rendre les autres heureux (Sauveur en recherche d’une Victime)

• Les autres ont le pouvoir de me rendre heureux (Victime en attente d’un Sauveur)

• J’ai le pouvoir de rendre les autres malheureux (Persécuteur en attente d’une Victime)

• Les autres ont le pouvoir de me rendre malheureux (Victime en attente d’un Persécuteur).

Le triangle de KARPMAN offrirait donc à chacun une sorte de solution de nature à combler ses besoins ou ses attentes.

Dès lors que vous identifiez les rôles dans le triangle de KARPMAN, vous pourrez apprendre à les contrer et à ne plus les subir.

Une fois que vous avez identifié le rôle de la victime, du sauveur ou du persécuteur, vous pouvez ajuster votre façon de communiquer avec votre interlocuteur afin d’éviter de perpétuer les schémas dysfonctionnels.

Détaillons maintenant le costume de chaque rôle, en nous focalisant sur chacun d’eux.

Focale sur la victime

Ne sommes-nous pas tous un peu la victime de quelqu’un ?

Un parent trop exigeant, une administration qui ne veut rien entendre, des personnes qui nous manquent de respect, un collègue qui ne fait pas sa part de boulot, un patron trop sévère, etc…

Lorsque nous sommes face à une difficulté, ou que nous devons assumer un mauvais choix, trouver un coupable est plus facile que de se remettre soi-même en question.

La victime ne cherchera pas réellement à sortir de son rôle, car elle reçoit attention, l’aide ou l’assistance et se sent aimée. Le sauveur aidera la victime mais sans vraiment la rendre autonome. Dans son rôle, il sera apprécié, reconnu, voir aimé. Chacun garde son rôle dans ce jeu de dupes tout en tirant profit des bénéfices secondaires qui en découlent. La victime attirera l’attention sur elle, et en particulier celle du sauveur. Se plaindre est en réalité la présentation d’une demande cachée, un moyen pour que l’on s’occupe d’elle.

Être une victime signifie aussi que toutes les difficultés rencontrées et le mal qui survient sont la faute du système, des autres, des persécuteurs. C’est donc une bonne excuse pour ne pas reconnaître ses responsabilités, et ne pas modifier ses habitudes.

A quoi bon essayer de changer, étant donné que les problèmes viennent des autres ?

En fait, la victime n’a pas toujours envie que la situation s’arrange, même si elle souffre ! Que ferait-elle si on ne s’occupait plus d’elle ?..

Vous venez de prendre conscience que vous jouez parfois ce rôle de victime ? Evitez de le renforcer par de la culpabilité.

Focale sur le persécuteur

Souvent les personnes qui ont tendance à persécuter ont vécu beaucoup de frustrations dans leur enfance. Et elles essaient de les faire payer, inconsciemment, aux autres. Vous vous sentez « un peu » dans cette catégorie ? Parfois « critiqueur » ou « persécuteur » ? Il serait intéressant de vérifier ce que cela réveille chez vous :

• Notamment, les reproches faits à l’autre, que réveillent-ils chez vous ?

• Qu’est-ce qui n’a pas (encore) été solutionné dans votre vie ?

• Qu’est-ce que vous autorisez ou, au contraire, vous interdisez ?

Le persécuteur est prisonnier de son propre contrôle. Il pourrait être intéressant de s’interroger sur vos réels choix de vie. Par exemple se poser ces quelques questions sur votre perfectionnisme :

• « En quoi est-ce important pour vous d’être parfait(e) ? »

• « La perfection existe-t-elle et si oui, à quel prix ? »

• « Que se passerait-il si vous n’étiez pas parfait(e) ? »

Sortir du triangle de KARPMAN, pour un persécuteur, passe souvent par le lâcher-prise.

Focale sur le sauveur

Le sauveur a une obsession : vous aider… sans même demander si vous avez besoin d’aide !

Il vous cajole, vous donne de bons conseils (les siens), vous réconforte, fait même les choses à votre place… Au point de devenir parfois envahissant et d’être alors perçu comme un persécuteur. Si la victime se plaint de l’intervention inopinée du sauveteur celui-ci rumine ce type de phrase : « Après tout ce que j’ai fait pour toi… »

Dans ce triangle infernal, le rôle du sauveur est parfois une fuite. S’occuper des problèmes d’autrui est le plus sûr moyen de ne pas s’occuper des siens. L’intervention du sauveur n’est-elle pas, parfois, une façon de nier ses propres besoins ?

Questions à vous poser si vous avez une tendance à jouer les sauveurs :

• « En quoi est-ce important pour moi de vouloir à tout prix sauver l’autre ? »

• « Que se passerait-il si je ne le faisais pas ? »

• « Qu’est-ce qui me fait si peur pour vouloir absolument m’occuper des autres ? »

• « Est-ce le seul moyen que j’ai trouvé pour nourrir mon égo ? »

Comment sortir de ce rôle de sauveur ?

Commencer par demander si l’autre souhaite être aidé. Cette aide devra être cadrée dans son contenu et dans le temps. Elle devra avoir une contrepartie pour éviter à l’autre d’être en dette. L’aide doit permettre à la personne aidée de faire sa part du chemin. Et il faudra qu’elle se responsabilise. L’aide doit permettre à la personne d’aller vers son autonomie. Rappelez-vous le dicton : « Ne lui donnez pas du poisson, apprenez lui plutôt à pêcher ! »

Quelques clés pour sortir du triangle dramatique

On ne peut pas changer l’autre. Par contre on peut commencer par se changer soi.

Quelques pistes pour sortir du triangle infernal :

Le lâcher-prise : Apprendre à exprimer vos convictions sans dénigrer les croyances de l’autre. Il en fera l’usage qui lui convient.

L’acceptation de l’autre tel qu’il est : La manière dont l’autre se comporte est moins importante que le chemin que vous parcourez.

Le respect : Vous exprimez ce que vous ressentez, vous posez vos limites sans blesser l’autre, en utilisant la communication non violente.

L’indépendance par rapport au résultat de vos actions : Qui êtes-vous pour croire qu’autrui devrait se conformer à vos désirs ? Accepter qu’une demande puisse recevoir un non ou qu’un geste qui part d’une bonne intention soit reçu différemment.

L’abandon de la volonté d’obtenir quelque chose par la manipulation : Si vous menacez (Persécuteur), vous vous plaignez (Victime) ou promettez (Sauveur), l’autre personne vous fera peut-être plaisir mais finira aussi par vous en vouloir.

L’abandon du rapport de force : Par exemple, « je suis malheureux à cause de toi. »(V). « Tu sais que je fais de mon mieux. » (V) ou « Tu sais que je fais tout pour toi, tu n’es jamais content(e). » (P)

L’abandon de l’amour conditionnel : Par exemple, « si tu m’aimais vraiment tu ferais … »). Privilégier l’amour inconditionnel. Agir pour vivre en conformité avec vos valeurs, votre spiritualité, ou pour seul plaisir celui de faire plaisir (voir également apprendre à dire non). Si vous donnez en attendant quelque chose en retour, ce n’est pas de l’amour, c’est du troc.